GENEVE, le 29 avril 2020 – Cuba, la Russie et l’Arabie Saoudite sont candidats à l’élection à la plus haute instance des droits de l’Homme de l’ONU, suscitant l’indignation des activistes des droits humains.
Les candidatures de ces trois pays, dont le piètre bilan en terme de droits humains est largement reconnu, ont été révélées aujourd’hui par un rapport de UN Watch, une organisation basée à Genève, active dans les droits de l’Homme. Dans son rapport UN Watch expose et réfute les arguments des différents candidats.
L’organisation non-gouvernementale appelle le Royaume Uni, la France, l’Allemagne, les Etats-Unis et les autres démocraties à « s’opposer fermement à l’élection de ces régimes répressifs », et à garantir qu’il y ait plusieurs candidats pour chacun des groupes régionaux.
En Octobre, l’Assemblée Générale de l’ONU élira 15 nouveaux membres sur les 47 qui constituent le Conseil des Droits de l’Homme, fondé en 2006 pour gérer les abus de droits humains à travers le monde.
Comme le dit Hillel Neuer, Directeur de UN Watch : « Elire la Russie, Cuba ou l’Arabie Saoudite au rang de juge des Nations Unies en matière de droits de l’Homme, c’est comme demander au loup de garder la bergerie. »
« Ce sont des régimes autoritaires et répressifs dont les peuples sont systématiquement privés des libertés fondamentales. Ils ont refusé l’entrée dans leurs pays à de nombreux experts du Conseil qui enquêtent sur les abus commis en matière de droits humains. Ces régimes ne sont en aucun cas qualifiés pour siéger au sein d’une instance qui façonne les standards des droits de l’Homme et dont le mandat est de gérer les violations et protéger les victimes. »
Les sièges, au sein du Conseil des Droits de l’Homme, sont attribués par régions. Au sein des ces régions, les Etats se mettent souvent d’accord sur une liste de candidats, éliminant ainsi toute compétition.
La liste définitive des candidats ne sera connue que peu de temps avant l’élection par l’Assemblée Générale de l’ONU en Octobre 2020, vote auquel prennent part les 193 états membres de l’ONU. On saura alors si Cuba, la Russie ou l’Arabie Saoudite auront à faire face à la compétition.
Comme le dit Neuer : « L’élection de Cuba, de la Russie et de l’Arabie Saoudite – des régimes qui ne respectent pas les droits fondamentaux de leurs citoyens – compromettrait la réputation des Nations Unies. »
« Si l’ONU permettait à ces pays d’agir en tant que champions et juges internationaux des droits humains, ce serait une insulte à leurs prisonniers politiques et à toutes leurs victimes ainsi qu’une défaite pour les droits de l’Homme en général. »
Appel au dirigeants onusiens
UN Watch demande au Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres et à la Haute Commissaire aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, de contester ces candidatures hypocrites.
Selon Neuer : « Ce serait absurde que l’ONU ignore ses propres règles et principes en approuvant les élections de Cuba, la Russie et l’Arabie Saoudite alors que ces régimes violent systématiquement les droits de leurs propres citoyens et font constamment échouer les initiatives de l’ONU visant à protéger les droits de l’Homme. »
En Octobre 2019, le Venezuela a failli ne pas être élu après l’entrée tardive du Costa Rica dans la compétition. Ceci prouve bien que Cuba pourrait perdre l’élection si les démocraties encouragent d’autres pays à se présenter au sein du groupe Amérique Latine et Caraïbes.
En 2016, UN Watch a aussi mené une campagne couronnée de succès contre la candidature de la Russie, démontrant une fois de plus que les nations de ce monde ont la possibilité de s’opposer aux pires oppresseurs si elles le veulent.
Réactions des activistes des droits de l’homme :
Rosa María Payá, activiste phare en faveur de la démocratie à Cuba, à la tête de Cuba Decide :
« La dictature de Cuba n’a rien à faire au Conseil des Droits de l’Homme. Le régime profite de la pandémie COVID-19 pour harceler et limiter davantage les libertés fondamentales des citoyens, empêchant toute critique ou pétition sur les réseaux sociaux, dans un cadre de pénurie croissante, de famine et de crise sanitaire, conséquence de l’inefficacité caractéristique d’une société centralisée où le seul employeur est l’État.
Parmi les actes de répression au cours de la pandémie de COVID-19, certains ont été battus pour avoir pris des photos de longues files d’attentes ou d’un bâtiment gouvernemental en ruine, d’autres pour avoir dénoncé les abus commis par des officiers et des bureaucrates.
Le gouvernement maintient plus de 8 000 innocents en prison, après des procès sans respect d’aucune procédure. Les détenus courent désormais un risque sérieux de contracter le coronavirus et d’autres maladies typiques des conditions insalubres dans les prisons et de la négligence du gouvernement. Parmi ces prisonniers se trouve le pasteur évangélique Ramón Rigal, dont le seul « crime » était d’éduquer ses enfants à la maison (une approche reconnue internationalement pour être efficace). »
Elham Manea, spécialiste du Moyen-Orient à l’Université de Zurich, écrivain, milite pour les droits des femmes et les droits humains en Arabie Saoudite :
« Malheureusement, je ne suis pas surprise. C’est un modèle qui ne cesse de se répéter au fil des ans: des États connus pour leurs violations des droits de l’homme sont nommés membres du Conseil des droits de l’homme. Comme si l’intention était de saper la crédibilité et le travail d’un organisme chargé de défendre les droits humains universels. L’Arabie saoudite viole impunément les droits de l’homme et continue de traiter lamentablement les militants saoudiens pour les droits de l’homme et les droits des femmes. Et pourtant, il est à nouveau nommé membre du Conseil des droits de l’homme. Scandaleux est le mot qui me vient à l’esprit. »